L’indécision : "Avoir le cul entre deux chaises"
Il y a une expression populaire, aussi triviale que révélatrice, que l’on entend souvent lorsque quelqu’un hésite trop longtemps : « Il a le cul entre deux chaises. » Derrière cette image un brin provocante, se cache un véritable fléau moderne : l’indécision.
Nous connaissons tous, à des degrés divers, ce moment suspendu entre deux choix, ce flottement entre deux directions, cette incapacité à trancher. Parfois anodine, l’indécision peut aussi devenir une véritable entrave à notre progression, à notre épanouissement, voire à notre liberté.
Pourquoi est-ce si difficile de choisir ?
L’indécision n’est pas seulement une faiblesse de caractère. Elle est souvent le reflet de mécanismes profonds, ancrés dans nos peurs, nos croyances, notre histoire personnelle.
Voici quelques raisons fréquentes pour lesquelles on reste bloqué entre deux options :
1. La peur de se tromper
Faire un choix, c’est s’exposer à la possibilité de l’échec. Et pour beaucoup, l’idée même de se tromper est insupportable. On préfère rester dans l’attente, là où aucun risque n’est pris. Ce que l’on ne réalise pas, c’est que ne pas choisir, c’est déjà faire un choix : celui de l’immobilisme.
2. Le perfectionnisme
Certaines personnes veulent faire le meilleur choix possible, le choix parfait. Ce besoin de perfection paralyse, car il est illusoire. Aucune décision n’est jamais parfaite, car chaque option comporte des avantages… et des inconvénients.
3. Le besoin de plaire
On hésite parce qu’on pense aux conséquences sur les autres : Que vont-ils penser si je fais ceci ? Et si je déçois quelqu’un ? L’indécis cherche souvent l’approbation extérieure avant de faire un pas, ce qui le rend dépendant du regard des autres.
4. Un manque de connaissance de soi
Comment choisir, si l’on ne sait pas vraiment ce que l’on veut ? L’indécision est parfois le reflet d’un vide intérieur, d’une difficulté à s’écouter, à sentir ses besoins profonds. On flotte alors entre deux réalités qui ne nous ressemblent pas.
5. Le traumatisme des choix passés
Quand des décisions passées ont mené à des déceptions, voire à des douleurs, on développe inconsciemment un rejet du choix. On redoute la répétition. On croit que choisir, c’est souffrir. Alors on évite.
Ce que vivre dans l’indécision produit
"Avoir le cul entre deux chaises", ce n’est pas seulement inconfortable : c’est épuisant. C’est rester dans une position instable, incongrue, qui empêche toute forme de sérénité. Voici les conséquences les plus courantes :
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Un épuisement mental constant : Le cerveau tourne en boucle, analysant sans cesse les « et si », les scénarios hypothétiques, les conséquences possibles.
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Une paralysie de l’action : Rien n’avance. Les projets stagnent, les relations se figent, les opportunités passent.
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Un mal-être diffus : On se sent impuissant, frustré, parfois même inutile. Cette impuissance sape l’estime de soi.
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Une culpabilité grandissante : À force de ne rien décider, on se sent fautif. On se reproche de ne pas agir, et ce reproche s’ajoute au poids initial.
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La perte de confiance en soi : Plus on tarde à décider, plus on doute de ses propres capacités. Le cercle vicieux est enclenché.
Comment sortir de l’indécision ?
1. Acceptez de ne pas tout contrôler
Il n’existe pas de garantie absolue qu’un choix sera « bon » ou « parfait ». Choisir, c’est prendre un risque, certes, mais c’est aussi prendre sa place dans sa propre vie. Il est temps de faire confiance à votre capacité d’adaptation.
Une mauvaise décision vous fait avancer. L’absence de décision vous laisse sur place.
2. Reconnectez-vous à vous-même
Prenez le temps de vous demander : Qu’est-ce que je veux, moi ? Pas ce que mes proches attendent, pas ce que la société valorise, mais ce qui fait vibrer votre cœur. Écoutez vos élans, vos intuitions, vos émotions.
Le corps ne ment pas. Quand un choix vous libère, vous le sentez.
3. Arrêtez de chercher le choix parfait
Il n’existe pas. Chaque option comporte des risques et des bénéfices. Choisir, c’est apprendre à vivre avec les conséquences… et à grandir grâce à elles. Acceptez de vous tromper. Vous apprendrez.
4. Avancez petit à petit
Vous n’avez pas besoin de trancher toute votre vie d’un coup. Faites un pas. Prenez une direction. Donnez-vous le droit de tester, d’expérimenter, d’ajuster. L’important, c’est le mouvement, pas la destination immédiate.
5. Fixez-vous un cadre de décision
Donnez-vous un délai. Exemple : « Je prends ma décision d’ici 3 jours ». Trop de temps nuit à la clarté. Créez un espace de réflexion, puis engagez-vous.
Une décision repoussée trop longtemps devient un poison lent.
6. Assumez votre responsabilité
Ne laissez pas les autres choisir à votre place. Cela soulage peut-être momentanément, mais cela vous rend dépendant. Votre vie, vos choix, votre responsabilité.
Exercice : Clarifier une décision pour retrouver sa direction
Objectif :
Aider la personne à sortir d’un état de flottement, à prendre du recul sur les éléments en jeu et à s’engager dans une décision éclairée, alignée avec ses valeurs.
ÉTAPE 1 : Nommer la situation d’indécision
Prends une feuille et écris clairement ce sur quoi tu hésites actuellement. Sois précis(e).
Exemple :
« Dois-je rester dans cette relation ou y mettre fin ? »
« Dois-je accepter cette proposition professionnelle ou chercher autre chose ? »
Formulation :
Je suis indécis(e) à propos de…
ÉTAPE 2 : Évalue les deux options principales
Trace un trait vertical au centre de ta feuille, pour créer deux colonnes :
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À gauche : Option A (ex : rester)
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À droite : Option B (ex : partir)
Sous chaque colonne, note :
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Les bénéfices potentiels
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Les risques ou inconvénients
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Ce que cette option nourrit en toi (valeurs, besoins)
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Ce qu’elle freine ou empêche
Astuce : Écris sans autocensure. Laisse sortir ce qui vient, même si c’est contradictoire.
ÉTAPE 3 : Analyse cognitive et émotionnelle
Maintenant, pose-toi ces questions :
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Qu’est-ce qui me retient ?
(Peur, culpabilité, regard des autres, manque d’information…) -
Qu’est-ce que je veux vraiment, profondément ?
(Et non ce qu’on attend de moi.) -
Quelle option m’apporte le plus de paix intérieure ?
(Même si elle est inconfortable au départ.) -
Quelle serait ma décision si je n’avais pas peur ?
(C’est souvent là que se cache la vraie réponse.)
ÉTAPE 4 : Teste la décision émotionnellement
Ferme les yeux. Imagine que tu as choisi l’option A. Visualise-toi dans cette décision.
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Qu’est-ce que tu ressens dans ton corps ?
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Est-ce que ça se contracte ou ça s’ouvre ?
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As-tu de l’enthousiasme, de l’apaisement, ou du stress ?
Fais la même chose avec l’option B.
Note les ressentis physiques et émotionnels.
Le corps donne souvent des réponses claires, là où le mental se perd dans l’analyse.
ÉTAPE 5 : Décision ou plan d’action
Deux issues possibles à cette étape :
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Si ta décision est claire → Note-la et écris :
Je m’engage à… + la première action concrète à faire dans les 48h.
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Si tu n’es pas encore prêt(e) → Fixe un délai réaliste pour décider (ex : 5 jours). Pendant ce temps, continue à observer, ressentir, en parler si besoin. Mais ne repousse pas indéfiniment.
Facultatif : Miroir extérieur
Si tu le souhaites, partage ton dilemme avec une personne neutre et bienveillante. Parler à voix haute peut parfois clarifier ce qui bloque.
Conclusion :
Ne pas choisir, c’est rester dans l’inconfort.
Choisir, c’est avancer, même imparfaitement.
Fais confiance à ton ressenti, à ton bon sens, à ta capacité d’adaptation.
La paix n’est pas dans l’absence de choix, mais dans l’alignement
À force de rester entre deux chaises, on finit par tomber. Mieux vaut en choisir une, même inconfortable au début, que de rester suspendu dans une position impossible.
Choisir, c’est se choisir.
C’est dire au monde : Je suis là, j’avance, je vis.
C’est sortir du brouillard pour entrer dans sa propre lumière.
Alors, quelle chaise allez-vous choisir aujourd’hui ?